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Beatriz y los cuerpos celestes 04/10/03 page publique
"Au début, pourquoi le nier, le rythme titubant de cette relation me convenait, car cela m'évitait de m'engager, de faire des promesses et d'assumer des responsabiltités. D'ailleurs, je veillais à garder mes distances. Mais à mesure que mes sentiments se renforçaient, à mesure que je me livrais davantage, je ne comprenais plus très bien le sens de la méfiance et des silences. La tristesse me prenait par surprise lorsque je pensais à sa vie quotidienne, loin de moi, à cet emploi du temps lointain, à ces besoins et à ces attaches que je devinais sans pouvoir les préciser -des normes de vie qui précédaient notre rencontre et qui lui survivraient. J'imaginais ce qu'[il] pouvait faire sans moi. Il devait lire, ranger ses disques, se promener longuement [...]...Je restais prise au piège de ces images déplaisantes car je ne connaissais pas d'autre moyen de l'approcher. Je lui inventais un passé horrible, précisément parce qu'il ne parlait jamais; tout ce que j'ignorais et qui l'incitait à taire tant de choses, tout ce qu'il dissimulait au milieu de confessions anodines ne m'éclairait pas davantage. Ce qui le poussait à s'arrêter au milieu d'une phrase, à hésiter longuement avant de prononcer une remarque banale comme s'il craignait la spontanéïté, parce qu'elle pouvait dévoiler une vérité. Ce qui me poussait, moi aussi, à garder le silence et à ne pas poser de questions. Un mur de doutes et de réserves s'imposait entre nous, une distance infranchissable nous séparait. Tout ce qu'on ne savait pas, ni lui de moi, ni moi de lui. Ce pourquoi je cessai d'en apprendre sur [lui], sur moi-même ou sur nous. Silences révélateurs qui se prolongeaient entre les phrases, témoins de ce que nous n'osions pas dire. Il me semblait que quelque-chose restait suspendu en l'air, comme une trace, liquide et insésissable qui m'échappait."
"Béatriz et les corps célestes" Lucia Etxebarria
Dit avec ses mots à elle ça parait beaucoup plus clair. C'est exactement ce que je ressents par rapport à Martin. Un abîme entre nous qui me parait infranchissable, et cette espèce d'énigme permanente autour de lui, comme s'il avait quelque-chose à cacher à tous. Et ça me fait tellement de peine...
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