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Hier soir, j’ai commandé une pizza.
PfffÂ…
Tout le monde a commandé un jour une pizza, un soir où on a la flème du siècle de se faire à manger.
21h02 : jÂ’appelle :
- Bonjour Pizza-facile Ă lÂ’Ă©coute !
- Bonsoir, Monsieur, disais-je surpris par un nom aussi stupide, d’autant plus que le prospectus ne signalait pas cette reconversion dans le ‘facile-à -bouffer’. D’habitude c’est plutôt dans le facile-à -vomir, mais… Bref…
- Bonjour, Monsieur. Vous désirez commander une pizza ?
Après un autre temps d’hésitation et devant la finesse de cette réflexion hautement calibrée, je commençais :
- Oui, Je voudrai une pizza Chorizo, mais sans le Chorizo, ça me tue le bide…
- HeuÂ…
Je sentais à son manque d’entrain évident que l’opérateur téléphonique n’était pas coutumier de mes habitudes alimentaires. Je précisais donc :
- Oui, oui, ne vous inquiétez pas, c’est comme ça que je commande. D’habitude j’ai Ali au téléphone – vous connaissez Ali, hein ? – Lui il sait…. Il enlève le chorizo et tout, quoi…
Tandis que je me répandais en excuses, j’entendais l’opérateur chercher désespérément un ‘Ali’ qui travaillerait ici….
- Ne quittez pasÂ…
- ...
Quand on te dit ‘ne quitte pas’ en général c’est pour une grande raison impériale : Le gars il ne sait pas et il va te refourguer le premier venu (pour peu qu’il s’appelle Ali…) Cependant j’entendais furtivement la conversation que l’opérateur avait avec une collègue, me semble-t-il :
- Hé, Sophia, tu connais un ‘Ali’, toi ?
- Qui ?
- ChuuutÂ…. JÂ’ai un client au phonetelÂ’ qui veut une pizza faite par Ali ??!!
- Mais, non, Avorton ! J’ai pas dit….. Pfff... gueulais-je sauvagement dans le combiné pour signaler à la fois mon mécontentement et ma présence au passage. Mais le serveur n’entendait pas.
- QuÂ’est-ce que juis dit au gars ?
- Chais pas, dis quÂ’tÂ’es AliÂ….
Et lĂ , elle se marreÂ…
Au demeurant, la situation est quelque peut comique, je le conçois… Sauf, que j’avais un peu faim et compte tenu de l’heure, je n’avais pas l’intention d’attendre trois plombes ma pizza chorizo sans chorizo…
- Bonjour, c’est Ali… Je vous fais la pizza comme d’habitude, Monsieur ? annonça-t-il en maquillant sa voix.
L’enflure, il a osé !!!
Deux solutions s’offraient à moi. Soit, je lui signalais respectueusement que je n’étais pas dupe et qu’en plus, il imitait trop mal Ali. Ou bien, dans un excès de franche rigolade (pendant qu’on y est) je jouais le jeu et lui faisais croire que je tombais dans le médiocre plagiat de mon ami Ali.
- Bien sûr Ali…. Comme d’hab’. J’optais pour un ton familier histoire que l’imitateur croit que sa tentative était fructueuse.
Imiter la voix est une chose, mais imiter le talent de cuisinier en est une autre.
- dis-moi AliÂ…
- Oui, MÂ’sieur...
- Tu fais comme jÂ’tÂ’ai dit pour la sauce, hein ?
- HuummÂ…
Là , je sentais l’hésitation monter.
- TÂ’as mal Ă la gorge oĂą quoi, lĂ ? T'as une drĂ´le de voix.
Et pendant quÂ’il se raclait la gorge Ă se rendre malade pour simuler la toux, je pouffais de rire devant le grotesque de la situation.
- Ouais, j’ai attrapé un sale truc hier… Bon, dans une demi-heure, répétait-il d’un ton qui invite à l’interruption de la conversation.
- Au fait, j’ai changé d’adresse, tu notes la nouvelle ?
...
Je lui donnais une adresse bidon, pas loin de chez moi pour le voir galérer à chercher une hypothétique Madame Shella Houam - Lâche-moi à l’envers, mais lui il n’a pas compris tout de suite… -
PfffÂ…
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