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Monseigneur Fritoph', sa Cour et moi. page publique
Une journée de travail comme les autres…
Dès l’aube, j’organisais ma journée à la quête du damoiseau susceptible de quérir quelques grains d’un excellent café importé de contrées lointaines. Telle était ma mission et telle sera mon dessein pour toujours. Le labeur m’attendait et je pressais le pas, enfourchant mon vieux canasson (100 000 au compteur) pour aller écumer l’asphalte.
Mon fidèle LT45 – c’est ainsi que je nomme mon canasson – m’ayant invariablement conduit là où je voulais dans les temps, je remarquai que Monseigneur Fritoph tentait depuis plusieurs minutes de me joindre. En effet, des pigeons voyageurs jonchaient le sol ici et là , m’avertissant de la demande dudit Monseigneur.
Je n’en tenais rigueur compte tenu, d’abord du peu de temps qu’il me restait avant que le glas ne sonne les douze coups marquant fatalement le moment de la pitance et ensuite je devinais derrière ces messages intempestifs une volonté mesquine de faire traverser le conté de l’Essonne à la recherche d’un hypothétique acheteur de café. Ma clairvoyance jusqu’à inégalée, m’incita à faire fi de cet ordre.
Je ne discernais pas encore quel malheur venait de s’abattre sur moi, ma famille et toute ma descendance jusqu’à la 5ème génération. En effet, arrivé à la cour de Monseigneur Fritoph, son dévoué valet Igue, ancien Bouffon à la Grande Cour ayant pris du gallon, Igue dit le Raboté, compte tenu de sa taille qui rivalise avec les plus grands lilliputiens, ce fascinant personnage m’interpellait, non content d’avoir enfin à faire le grand :
- Oh ! oh ! Que v’la tu, ‘faut qu’tu courres de ce pas voir le Seigneur Fritoph, sous peine d’être éventré cul nu sur la place publique ! Son fort accent Terreau-paysan que j’avais désormais dompté m’inquiétait quelque peu :
- Plaît-il petit laquais ? Me dis-tu qu’il me faut sans tarder m’enquérir de la santé du Roi ? - Non ! Crévure ! Monseigneur Fritoph te recevra… Prie pour qu’il t’épargne, supplie pour que grâce te soit faite !
Je partais d’une foulée royale – rapidement - rejoindre les pièces intérieures de Monseigneur Fritoph et m’informer de l’objet de la plainte. - Que t’arrive-t-il mon ami ? Tu n’es plus comme avant. Dis-moi, tu as des soucis, on dirait que tu es soucieux, aurais-tu des soucis ? - Mais ? Mon Maître ? Que Dieu me garde, je vais bien. Vous me donnez l’écu pour nourrir famille et bêtes, vous vous enquérez de ma vie jour après jour, comment pourrais-je ne pas aller, moi qui suis au service de Monseigneur depuis de nombreuses lunes. - Il me semble que tu changes. Ta fidélité s’amenuiserait-elle ? Tu ne réponds plus aux pigeons voyageurs que j’envoie [et du coup ça augmente mon budget pigeon – chuis un peu rik-rak en ce moment, alors si tu pouvais faire un effort…] - Seigneur ! j’implore ton pardon ! Je te supplie, miséricorde-moi (On peut, à ce stade de la discussion, inventer des mots) ! Aie pitié d’un vil ingrat. Mais il faut tu comprennes que cette technologie demande plus que le seul et unique neurone qui habite mon crâne. Mon intelligence plafonne à 2 sur l’échelle de Richter. Je t’en conjure ! ne me lapide pas !
Un long silence fit place. Je devinais la jubilation intérieure intense qui devait en ce moment même traverser l’échine déjà glaciale du Seigneur Fritoph. Même si aucun sourire ne s’affichait sur son visage, je voyais cependant, compte tenu des ricanements de Igue Le Rabot qui se trémoussait derrière sa table salement encombrée, je voyais le ravissement extrême dans ses yeux. Je lançai un dernier ‘hum ?’ pour tenter d’influencer un tant soit peu sa décision.
- il va falloir que tu reviennes à des jours meilleurs, comme quand tu m’obéissais au doigt et à l’œil. - Oui ! Mon Doux Maître. Que tu es Bon et Généreux. Quelle joie de te servir. Laisse-moi t’honorer en te faisant cette promesse solennelle. Je m’engage devant Toi Ô Grand Seigneur Fritoph de ne plus jamais m’égarer de la sorte et de me rappeler chaque jour que Dieu fait que tu m’as évité l’éventration cul nul sur la place publique. - File maraud et que je ne t’y reprenne plus !
Il était vraiment moins une pour moi. Igue Le Raboté gloussait encore dans ses dents mal lavées quand je quittais penaud la salle du Conseil. J’avais été généreux dans mes flatteries, je pensais même avoir surpassé toute la horde des bouffons licheurs, mais c’était sans compter sur Igue Le Raboté qui nous faisait un best of différent chaque jour. C’est à se demander comment il trouve autant de encensements à faire à l’égard de son Seigneur.
Bref, la journée de demain sera sûrement d’un autre type….
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