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Me, myself and I page publique
Mon regard s’est perdu dans les feuilles mortes qui font revivre la saison. Elles ne volent plus, tellement nos pieds les emportent vers de tristes horizons. Assis près du canal, c’est l’automne et il fait doux. Sur le banc en métal qui résonne quand mes pieds tapent en dessous.
J’ai eu sept ans aujourd’hui et j’ai appris que je partais loin d’ici, Loin de chez moi et de mes amis, vers un pays qui me volera ma vie Comme on vole des crayons à la rentrée des classes, Sauf que là , mon garçon, ce n’est pas une farce…
Devant moi, il y a une flaque d’eau dans laquelle mon image se reflète. Je me dis : « C’est comme ça. Les grands disent qu’à sept ans on est bête. » Une dernière larme s’échappe sans glisser sur ma joue. Il a fallut que je l’attrape pour cacher mon dégoût.
Le dos courbé sur mon banc en métal vert, J’attends, décidé, des bras prudents pour serrer ma misère.
Maintenant, je suis grand et mes yeux se perdent toujours Dans l’automne flamboyant et ses proverbes d’amour. Le canal a cédé son élan à de gigantesques tours, Une galerie pleine de marchands où le grotesque se savoure.
Il n’y a plus de flaque, mais de grandes dalles en béton Sur lesquelles les enfants vaquent au pied de leurs maisons. Et leurs cœurs dessinés à la craie par terre me gênent. J’ai bien peur qu’ils m’effraient à me faire manquer d’oxygène…
L’enfant d’autrefois n’a pas grandi malgré ses trente ans, La même innocence dans ses doigts affaiblis par le temps, La même envie de fuir dans son imagination, Avec ses seuls délires qui ne lui volent pas ses crayons.
Le dos courbé sur mon banc usé par les badauds, J’attends, dégoûté, des bras puissants pour briser mon étau.
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