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Relax Max page publique
Le besoin de me ressourcer m’a conduite au parc, près du petit lac. J’ai essayé de me fixer sur le bruit de la cascade artificielle, me plonger avec les poissons, frémir avec le vent. J’ai levé la tête pour grandir avec cet arbre au pied duquel j’étais assise. Pourquoi ne faisais-je pas cela plus souvent ? Quelques canards sont venus s’installer près de moi, sans même quémander de la nourriture. Pourtant j’avais déballé un sandwich acheté avec les tickets restaurant de mon père, et j’avais réussi à en prendre quelques bouchées. Je me suis finalement résignée à terminer au moins une boisson gazeuse, je m’étais assez forcée à manger. Un homme était venu pour me dire « Bon appétit. » je n’avais pas entendue cette phrase, alors je lui avais demandé de répéter. - Bon Appétit ! Avait-il dit-il plus fort, en souriant, et en montrant du doigt le sandwich que je tenais. J’avais réussi à lui esquisser un sourire en le remerciant. Il m’avait parlé des poissons, de leur prolifération. Il était vrai qu’il devait y en avoir une dizaine au décimètre carré, gobant là , à la surface. Eux, étaient certainement bien nourris.
Les canards qui s’étaient installés près de moi quelque temps après le départ de l’homme étaient calme, et ne semblaient pas être perturbés par ma présence, comme si je faisais tout-à coup partie du décor. J’en ai profité pour observer leur plumage, que j’aurais bien caressé, si je n’avais tenu aucun compte de leur propre liberté. L’angoisse m’a reprise tout à coup, alors je me suis efforcée de respirer, profondément, par l’abdomen. Même ça ne marchait pas. J’ai finalement été obligée de prendre un calmant. C’est vraiment dommage. J’avais des livres à rendre à la Bibliothèque. J’ai voulu en prendre d’autres mais rien ne me satisfaisait. Alors j’ai longuement marché dans les rues piétonnières, et c’est finalement un livre sur la méditation que j’ai acheté. J’en ai profité pour acheter quelques petits sachets de couleurs vives pour y mettre la lavande que je conservais jusque-là dans une boîte en plastique. J’ai dépensé de l’argent alors que je n’en ai pas. Et alors ? Ce ne sont pas des folies, juste un petit geste envers moi-même; juste une dizaine d’Euros pour me faire plaisir et pour aller mieux. Une femme à un coin de rue m’a tendue un ruban bleu en me disant « Tenez, c’est pour la lutte contre l’exclusion. » En sortant mon porte-monnaie, je lui ai demandé : « Quel type d’exclusion ? ? » Elle m’a répondu « Pour ceux qui n’ont pas de travail et ne peuvent pas payer de logement. » En lui donnant la pièce, je lui ai dit que je ne pouvais pas faire beaucoup plus, étant moi-même au chômage, et que je n’avais bientôt plus de quoi payer le loyer. - Eh, oui, que voulez-vous, chacun fait ce qu’il peut ! M’a-t-elle rétorqué d’un regard noir en se tournant vers d’autres passants. Quelle arnaque ! Je me suis retenue de lui demander « Ah oui ? Et c’est quoi le nom de votre association ? » Sa fille, je suppose, qui était derrière la femme m’a lancé un regard désespéré, comme pour dire qu’elle voyait bien que c’était dégueulasse, mais qu’elle n’y pouvait rien. Cette femme se verra certainement récompensée un jour, ce n’est pas à moi de lui faire payer, elle se le paiera toute seule. Je ne m’en veut pas d’être tombée dans le panneau. Je voulais simplement aider. Il n’y a aucun blâme à ça, et si la cupidité est un vilain défaut, alors lynchez-moi sur la place publique. J’ai marché, encore, et encore.
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