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Prélude page publique
Et voilà , on y est, une insomnie. Ma vie est une insomnie. Impossibilité de trouver le sommeil, impossibilité de trouver le repos. C'est une maladie, une fièvre qui tourne douloureusement à l'obsession. L'insomnie me rend visite presque chaque soir, fidèle, inaltérable. J'ai beau passer des heures à regarder ce vide qui soudain enveloppe le monde sous mes yeux, à lire, à me retourner inlassablement dans mon lit, à surfer sur le web, à dessiner ou écrire, il m'arrive de perdre tout repère jusqu'à la pointe du jour. Elle est un néant sans fin ni commencement, une ombre opaque et froide qui laisserait un parfum de solitude et d'égarement dans mon appartement. Pourquoi je n'arrive pas à dormir? Ai-je le coeur trop lourd de secret? Ces derniers temps ma sensibilité est à fleur de peau; et donc, de nouveau, je pleure. Ces pleurs ressemblent à des cris de révolte et de haine. C'est le sentiment d'injustice et de chagrin qui transparaît. Au fil des mois, des années, mes larmes ont appris à se taire, jusqu'à devenir parfaitement inaudible. Pourtant, elles ont toujours éxistées, elles étaient bien là , ancrées dans mon silence. Le silence était ma thérapie. Tallulah prétend que je dois me vider la tête et que ce journal pourrait m'aider... Un nouveau traitement docteur? Elle a peut-être raison, je me sens comme un cèpe de vigne qui plie lentement sous le poids de ses grappes de raisins. Il est temps que je me vendange le coeur!
Comme mes insomnies se font de plus en plus fréquentes, je cherche désespérément un moyen d'y pallier. Jusqu'à présent, toutes mes tentatives sont restées infructueuses; y compris celles de cette nuit. J'avais dans l'idée de promener mon chien, de marcher jusqu'à l'épuisement. J'ai fait plusieurs fois le tour de mon village, dix, quinze, peut-être même vingt fois, peu importe, puisqu'en définitive, je n'ai fait que le tour de la nuit... Au cours de ma marche, je me suis arrêté pour observer le ciel. Je me suis alors rappelé avec mélancolie qu'enfant, je connaissais le nom de toutes les constellations. J'ai continué d'enchaîner les pas, avançant un peu plus sur le fil de ma pensée. Je suis parti de mon âge tendre jusqu'à maintenant. Où sont mes rêves? Mes projets? Où est cette vie que le petit Wilde désirait tant? Tout n'est plus qu'un souvenir qui ondule au fond de ma mémoire, un spectre resté à l'état de chimère, un doux rêve de gosse... J'avais l'effroyable sentiment de ne pas vivre ma vie, mais plutôt ce qui aurait dû en être sa parodie. Assommé par cette triste vérité, j'ai consulté une dernière fois les étoiles et je suis rentrée chez moi.
Maintenant que je suis assis à mon bureau, une question subsiste. Qui suis-je allé promener? Mon chien, ou mes idées noires?
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