Journal public |
|
| |
Il est bientôt minuit, enfin.  page publique
Il vient de passer la porte et sa première caresse fut pour moi.
Le premier regard est celui qui compte le plus a dit Verlaine. Et bien son premier regard pesait sur le mien. D'abord son regard était plein d'eau, une fois de plus, et il montrait que tout ce qui comptait était devant ses yeux, c'est à dire moi. Je suis celui qui vit avec lui, je suis le seul à le comprendre après tout. Je pense à une chanson de William Sheller qui dit "je m'gênerai pas pour dire que j't'aime encore..." Si vous voulez les paroles complètes, je pourrai vous les fournir. Pas de problème.
Erf! Il vient de mettre de ce truc orange dans son coca... Il appelle ça du "visky" ou un truc dans le genre. Il fait ça tous les soirs où il a perdu encore un peu de son humanité à trop vouloir aider les autres.
Il est comme ça après tout, mon père. Il aide les autres mais rien ne vient jamais en retour. Et moi, je suis sur ses genoux en ce moment et il me caline les yeux fermés alors que mes pattes viennent frôler les touches blanches. Il ne voit pas et n'entend pas ce que je fais... D'ailleurs je pense qu'il s'est endormi, tant mieux, je peux continuer à frôler les touches.
Quand il est rentré tout à l'heure il m'a dit que c'était "jour de fête"... C'est vrai que ça l'est. Il m'a donné de la patée (le soir!!!) ET du lait!!! Mais ensuite, alors que je venais de finir de manger il m'a dit qu'il m'aimait très fort. Et ça, ça n'est jamais bon signe. Ca veut dire que quelqu'un lui a fait du mal ou que personne ne lui a fait de bien. Pour ce soir, j'opte pour la seconde version. Il a du jouer toute l'après-midi avec son ami "Pat" et d'autres encore et ils ont du lui raconter plein de choses qui l'ont rendues triste. Par exemple qu'à son âge ils avaient déjà rencontré celles avec qui ils passaient leurs vies, ou bien une histoire d'enfant sûrement. Mon père aime les enfants. Il les adore au point d'en vouloir déjà ! Il me dit toujours qu'il aimerait enfin pouvoir aimer quelqu'un à travers quelqu'un d'autre, je ne comprends pas tout parfois mais je vous dis ce qu'il me dit et vous vous débrouillez avec ça na! Il parle souvent "d'enfants", de "famille" et "d'amour durable". Je ne sais pas ce qu'il veut dire mais moi je sais que je l'aime et que c'est tout ce qui compte. Il me caline encore alors que de l'eau s'échappe de ses yeux... Mais c'est pas grave vu qu'il est là .
Sinon, mon père lit beaucoup. J'aime bien quand il lit car j'ai ma place sur ses genoux pour l'aider. Il apprécie particulièrement un auteur (apparement ça veut dire celui qui écrit) quis'appelle Pierre Desproges. Il dit souvent "comme disait Pierre;"tralalala et pouet pouet"... Il aime bien dire ça mon père. Il passe souvent du temps dans sa chambre pour relire certains passages de "Monsieur Pierre" (comme il aime à dire). Ce que j'aime leplus, c'est quand il me fait la lecture. Il me pend sur ses genoux (c'est pas à moi de venir) et il me lit des passages de Mr Pierre. Je comprends pas tout mais entre chaque page, il me caline un peu et ça, c'est super...
Bon. Je suis ennuyé là (désolé d'ouvrir une autre parenthèse mais bon)... Ma gamelle est vide et je dois le lui dire, un instant je vous prie.
Voilà .....
C'est mieux.....
Oh non! Il met de la musique qui lui fait mouiller ses beaux yeux! Mrrraou!!! Pas bien!!! Oh non! C'est du William Sheller!!! C'est toujours pareil quand c'est lui qui chante. Mon père a du mal à me prendre sur ses genoux car il se recroqueville sur lui même et j'ai plus droit à ma place! C'est pas juste! MMMRRRAAAAOOOUUUU!!!!
Bon, j'ai trouvé un moyen simple. Je miaule et HOP! Il croit que je suis malheureux et il s'occupe de moi, FLUTE! Il a vu que je tapais les touches blanches avec mes pattes je dois vous laisser... Bon.
Je vous retrouverai sûrement plus tard, quand il dormira. Il va finir son verre de "visky-coca" et aller faire dodo dans son lit, j'espère que je pourrai venir!
Si je peux venir je continuerai ces lignes demain sinon à tout à l'heure, je vous retrouverai quand tous la nuit vous brouille et donc, quand nous, nous devenons; gris.
|
